Stéphane Jégo est le chef et propriétaire du restaurant L'Ami Jean, à Paris. Décidé à préparer la réouverture de son établissement, il a lancé une pétition
pour demander au gouvernement de décréter l'état de catastrophe sanitaire naturelle. Tout en s'activant pour préparer des plats pour des associations
ou en soutenant ses fournisseurs via la vente à emporter.
« Depuis deux semaines, le nombre de couverts servis chez L'Ami Jean baissait. J'avais commencé à préparer mon équipe. Dès le vendredi 12 mars au matin,
j'ai rencontré mon expert-comptable pour savoir comment on allait faire. J'ai aussi appelé mon assureur pour parler avec lui de la manière dont la
crise sanitaire serait prise en compte. La réponse a été la même que pour les conséquences du mouvement des gilets jaunes ou pour les dernières grèves
qui ont eu un fort impact : rien n'était prévu pour les pertes d'exploitation.
Le samedi matin, quand je suis arrivé au restaurant, tout le monde était sur le pied de guerre. Le soir, l'une de mes collaboratrices m'a appelé pour me
prévenir que les restaurants devaient s'arrêter à minuit. On a fermé L'Ami Jean en se donnant rendez-vous le mardi matin. Avant, finalement, le lundi,
d'annuler cette rencontre. Avec le confinement, je gère les choses seul.
Assureurs paternalistes
Depuis, avec d'autres, j'essaie de mobiliser tout le monde autour de la pétition (sur Change.org, NDLR) que nous avons lancée pour demander au gouvernement
de décréter l'état de catastrophe naturelle sanitaire afin que les assurances nous indemnisent. J'ai contacté des chefs, l'interprofession. Mais la
pétition ne concerne pas seulement la restauration et l'hôtellerie. Elle touche tous les types de commerces. Nous savons ce qu'il y a sur les contrats.
Mais on attend des assureurs qu'ils montrent un visage paternaliste pour nous aider dans ce qui va être une catastrophe.
Après la guerre sanitaire que nous vivons, il y aura une guerre économique mondiale, nationale et à l'échelle d'un quartier. Nous avons besoin d'être armés
alors qu'on ne sait pas quand elle prendra fin. Même si le gouvernement a mis rapidement en place des mesures indispensables, comme le chômage partiel.
Point relais
Un établissement comme le nôtre implique une vingtaine d'employés et 150 fournisseurs. Si un producteur de carottes flanche, c'est tout un écosystème
qui est en difficulté. Or, après le mouvement des gilets jaunes, puis les grèves, la trésorerie a fondu.
Aujourd'hui, il y a encore beaucoup à faire. Dimanche dernier, j'ai cuisiné pour des associations. Cette semaine, L'Ami Jean est devenu un point de
relais pour des fournisseurs. Ils y font de la vente à emporter pour pouvoir écouler leur production. Il faut rester mobilisé. Ce qui importe,
c'est de préparer la réouverture, en sachant que le restaurant ne sera pas plein les premiers jours. »